L’an mil cinq cens quarante | huict feurent consulz, |
noble Nicholas de Leques, seigneurAbrégé : seigner de Bucelly,
sire Jehan Cristol, merchant,
Anthoine Trouchard,
Pierre Crozat, Canabassier :
tisserand de toiles de chanvre et d'articles de lingerie, serviettes, nappes, sacs
(Dictionnaire des institutions, des
coutumes, et de la langue en usage dans quelques pays de Languedoc de 1535 à
1648, Montpellier, imprimerie Déhan, 1964, 728 p., p. 120). , ,
Jehan Cosin, mareschal,
Jehan de L’Hostal, jardinier.
AudictAbrégé : Aud an le roy Henry estant en tresve de |
toutz coustés ou paix, partant de Paris
sur | la fin du mois d’apvril, passant par la | Champaigne, Borgonihe et Lyon, s’en alla visiter | ces pays de Savoye et Puechmont. Cependant | en Guienne sourtit grand elevationAbrégé : elevaon[a]Comprendre «
soulèvement ». du peuple | pour occazion de l’ augmentationAbrégé : augmentaon de la gabelle | du sel, mesmes en la ville de Bordeaulx | ou le seigneur de Moneins, lieuctenantAbrégé : lieuctent du roy | et soubstenant son aucthorité, y feust __
[Fol. 526 r°]
__ murtry par cedition
popullaire, pour a quoy provoir[b] Comprendre «
pourvoir ». | feust par le roy de Puechmont en hors despartir | monseigneurAbrégé : monsr le conestable de Montmorency avec forces, |
lequel, a ces fins ce acheminant, passa par MontpellierAbrégé : Motpellr | au moys d’octobre auditAbrégé : aud an, et au moys de novembre | suyvant, tenantz les estatz du
pays a MontpellierAbrégé : Montpellr soubz | monseigneurAbrégé : monsr le comte de Villar, lieuctenantAbrégé : lieuctent general auditAbrégé : aud pais, | le roy Philippe d’Espaigne, filz
de l’ empereur | Charles, allant en Ytallie et Allemaigne devers son | pere par mer, par
l’indisposition du temps aborda | en Ayguesmortes ou, les estatz interrompus, ledictAbrégé : led | seigneurAbrégé : sr comte de Villar ce transporta pour caresser | ledit Abrégé : ledroy Philippes de la partAbrégé : pt du roy.
Année 1548 : commentaire historique
L’année 1548 semble pouvoir être placée sous l’adage
. C’est une charnière qui articule événements récents et prises de position qui ouvrent le champ des possibles de l’avenir. En effet, le Thalamus relève d’abord la trêve de quelques mois avec les puissances voisine. L’accalmie est toute fois mise à profit pour fortifier les positions françaises et préparer l’avenir diplomatique. Aussi, et les faits doivent être relevés pour donner tout son relief au récit de cette année, Marie Stuart, reine d’Écosse âgée de 6ans et promise au Dauphin François est accueillie et éduquée en France ; il s’agit ainsi de fortifier l’ « Auld alliance » mais aussi et surtout pour les Valois de bien se placer pour la succession au trône d’Écosse. De même, est célébré le 20 octobre 1548 le mariage entre Jeanne d’Albret, héritière du royaume de Navarre et Antoine de Bourbon, prince du sang. Pour Henri II, il s’agit d’abord d’éviter le rapprochement envisagé entre la Navarre et l’Espagne, qui offrirait aux Habsbourg une position stratégique à l’intérieur du royaume de France. Toutes pacifiques soient supposées les unions matrimoniales contractées en signe ou en gage de paix, elles n’en demeurent pas moins liée aux rivalités entre royaumes, chacun cherchant à contracter des alliances tout en avançant masqué. Ainsi, le comte de Villars, lieutenant-général de la province peut-il « caresser au nom du roi » Philippe d’Espagne à Aigues-Mortes, qui fut aussi le lieu de la rencontre entre Charles Quint et François Ier en 1538. En 1548, il s’agit à nouveau de feindre l’amitié perpétuelle pour gagner le temps nécessaire à remettre de l’ordre dans les provinces du Royaume. Dans cette perspective, les voyages d’Henri II en Champagne, Bourgogne, Lyon et Piémont et de Philippe d’Espagne, envoyé à travers les possessions des Habsbourg en Italie et en Allemagne pour se former au métier de roi sont parfaitement symétriques. Dans ce système de cours itinérantes, voir le roi c’est le reconnaître, c’est aussi resserrer les liens personnels avec la monarchie, c’est enfin prendre (re)possession de provinces soit délaissées soit dévastées par les guerres. L’année 1548 est aussi mise à profit pour restaurer et réformer les finances du royaume.Mettant à profit l’opposition entre le une partie du tiers-État, les villes et les privilégiés pour la répartition de la taille, Henri II arbitre le conflit et se substitue à l’autorité provinciale pour décider de l’impôt ; en cela, il joue la division locale au plus grand profit des finances royales tout en apparaissant comme le protecteur du peuple. L’affaire de la révolte de la Guyenne est différente. Face à l’imposition de la Gabelle, décidée par François Ier en 1541 mais mise en place en 1548, la Guyenne se révolte, d’abord à Lorignac lorsque les gabeleurs sont pourchassés par la population, puis à travers toute la province jusqu’à Bordeaux qui se révolte ouvertement contre le Parlement (cour de justice). La réaction royale est énergique. Montmorency, gouverneur du Languedoc, avec peu d’attaches en Guyenne donc peu susceptible de commisération, est envoyé noyer la rébellion dans le sang et la cendre. Les clochers des villes soulevées sont abattus, comme à Marmande, à Bordeaux, une centaine de personnes est exécutée. Montmorency apparaît impitoyable, mais dans le même temps, c’est à partir de 1548 que les gouverneurs comme les lieutenants-généraux sont assistés de maîtres de requêtes envoyés par le roi et « ancêtres » des intendants. Henri II semble donc commander la répression d’un côté pour mieux apparaitre comme la solution au conflit : il décide ainsi de revenir sur la réforme de la gabelle pour les communautés de Guyenne qui sont ensuite qualifiées de « rédimées ». In fine, l’année 1548 concentre tous les éléments d’un renforcement du pouvoir royal : envois de maître de requêtes, intervention des gouverneurs en dehors de leur province, assujettissement des États provinciaux, comme en Dauphiné, répression violente des soulèvements contre l’autorité royale, tout en gardant les attributs traditionnels et paternalistes de la monarchie qui constituent la figure du roi de justice. Mais ces différents éléments sont mis au service d’une politique extérieure qui constitue le point de convergence des alliances, des décisions et des réformes imposées au royaume.Sur l’endogamie aristocratique et la diplomatie de la chambre à coucher :Lucien Bély, La société des Princes, Paris, Fayard, 1999.
Bibliographie :
Stéphane-Claude Gigon, La Révolte de la gabelle en Guyenne, 1548-1549, Paris, Champion, 1906, 298 p.
Yves-Marie Bercé, Révoltes et révolutions dans l’Europe moderne, Paris, PUF, « L’historien », 1980, 263 p.