L’an mil cinq cens soixante neuf | feurent crees consulz catholicques, |
monseigneur Abrégé : monsrmessireAbrégé : me Pierre Convers, maistreAbrégé : me en la chambre | dez comptez,
sire Francoys Colombier, borgeoys,
sire Estienne Plantade, merchant,
[Fol. 548 r°]
__
Pierre Costier, cardeur,
Anthoine Canuas plus vieulx,
Pierre Bandasse, laboureur.
Le vingtcinquiesme de mars audictAbrégé : aud jour de l’AdnontiationAbrégé : Adnotiation | Nostre Dame et que lesdictzAbrégé : lesd consulz prindrent serement[a] Comprendre «
serment »., feust | faicte a MontpellierAbrégé : Montpell procession generalle et resjouyssanceAbrégé : resjouyssan | pour la victoire obtenue par monseigneurAbrégé : monsr d’Anjou | en Guyenne contre lez huguenotz,
le tretziesme dudictAbrégé : dud moys, | en ung lieu dict Passac[b] Il s’agit de
Bassac, sur le théâtre de la bataille de Jarnac (1568). , près Jarnac sur la riviere | de la Charante, auquel rencontre monseigneurAbrégé : monsr le prince de | Condé, chef dez ennemys entre aultresAbrégé : aues, avoyt esté | thué, qui despuys firent leur chef monseigneurAbrégé : monsr le | prince de Navarre et prince de
Condé, filz du deccedé, jeunes | adollessans ne servantzAbrégé : svantz que de non[c] Comprendre «
nom ». au seigneur | de Castilhon, admiral,
principal conducteur de ceste ligue. | Au moys de may ensuyvant, monseigneurAbrégé : mons le mareschal | de Dampville et monseigneurAbrégé : monsr de Joyeuse, congediés parAbrégé : p le | roy, du camp de Guyenne s’en viennent en Languedoc | par TholoseAbrégé : Thle ou feurent longuement. Au moys d’aoust, | lez huguenotz de Cevenes ce saizirent de Malguel | près MontpellMontpellier, lequel lieu comme l’on scaict
tres fort | d’assiette, pour en eviter la garde au commancement | de
ce trouble avoyt esté desmantellé, mays | soubdainement ilz le
rempararent et firent inprenable, | que porta grand ennuy a MontpellierAbrégé : Montpell despuys pour sa __
[Fol. 548 v°]
__ proximité. En ce temps feust
descouverte une | grand trahison a Montpellier et les aucteurs punys. | Le seiziesme de
novembre feurent apportés | novelles d’aultreAbrégé : aue victoyre obtenue parAbrégé : ple roy | et son armee contre lez hugunotz le troysiesmeAbrégé : troye | d’octobre precedantAbrégé : pcedant, en ung lieu dict Montcontour | en Guyenne, en avoyent ilz
perdus dix ou | doutze mil hommesAbrégé : homes et leur artillerie en mesme | temps, de la my novembre
lez huguenotz | surprindrent de nuict la ville de Nismes | ou firent grand murtre dez catholicques | et entre aultresAbrégé : aues du seigneur de SainctAbrégé : St André, | gouverneur d’Ayguesmortes et pour
lhors | dudictAbrégé : dud Nismes, et deslhors comencerent lesdictzAbrégé : lesd | huguenotz fere grandz courses sur le pays.
Année 1569 : commentaire historique
La chronique de l’année 1569 débute avec l’annonce à Montpellier de la victoire royale de Jarnac (13 mars 1569) sur les troupes dirigées par Condé, tué lors des combats, et de Coligny (voir l’année 1568), qui prend la tête des réformés. Le Petit Thalamus, écrit a posteriori, rappelle que c’est dans cette bataille que les jeunes Henri de Condé (1552-1588) et Henri de Navarre (1553-1610) ont fait leurs premières armes avant de diriger le parti protestant. L’annonce à Montpellier de la victoire royale est reçue comme un succès catholique : les protestants enfuis dans les Cévennes ne sont plus au pouvoir et les six consuls sont catholiques. De plus, la bataille de Montcontour finit de défaire les armées protestantes : le 3 octobre 1569, en Poitou, le reliquat de l’armée menée par l’amiral de Coligny ayant échoué devant Poitiers rencontre à Moncontour les troupes royales menées par le duc d’Anjou. Les troupes de Coligny, diminuée par des mercenaires qui changent de maître pour une plus grande solde, paie au prix fort sa défaite : de 6000 à 10 000 morts et prisonniers, dont une grande partie sera exécuté par la suite. Si, à l’échelle du royaume, les protestants semblent défaits, le conflit n’est pas pour autant éteint et plutôt que de prendre la forme de batailles rangées défavorables aux protestants, comme à Jarnac et à Moncontour, la guerre est atomisée en une kyrielle de petits conflits, de petites prises, d’escarmouches plus ou moins importantes, de ruses pour prendre une ville ou une fortification. Ainsi, le château de Calvisson dans le diocèse de Nîmes est enlevé quelques jours par les protestants, ils essaient aussi de prendre Alès, prennent le fort de Peccais dans les salins d’Aigues-Mortes, puis Malguel (aujourd’hui Mauguio) à la mi-août 1569, situé aux portes de Montpellier. Ils s’empressent alors de fortifier à nouveau l’ancienne motte féodale désarmée quelques années et qui résiste à la tentative de siège du gouverneur de Montpellier, accouru sitôt informé. Si les protestants échouent à reprendre Montpellier après la trahison d’un capitaine de la ville nommé Barri, décapité après que le complot a été découvert, tandis que les autres membres de la conjuration sont pendus ou expédiés aux galères, ils parviennent à enlever Nîmes. L’affaire a tout du roman de capes et d’épées. Les protestants réfugiés dans un lieu fortifié proche de Nîmes emploient un artisan pour limer la grille de l’aqueduc souterrain permettant l’évacuation des eaux de la ville. Plusieurs dizaines de soldats protestants menés par Nicolas de Calviere et le sieur de Servas pénètrent alors dans la ville la nuit du 15 au 16 novembre 1569 et massacrent 150 à 300 catholiques, dont nombre de religieux Le gouverneur de la ville essaie d’échapper au massacre en se jetant d’une fenêtre. La jambe brisée, reconnu, il est achevé d’un coup de pistolet avant d’être mis en pièces par la foule. Ces combats locaux, sporadiques et de faible intensité, rivalisant par le caractère sanguinolent de mises à mort destinées à frapper d’effroi l’ennemi, participent d’une atomisation du conflit et entretient un sentiment d’insécurité, de méfiance qui arme les hommes, pousse au massacre de l’Autre pour ne pas être à son tour massacré.
Bibliographie :
Michel Cassan, « Guerres de Religion, Pacification, Réconciliation », in Conciliation, réconciliation aux temps médiévaux et modernes, ed. by Collard Franck and Cottret Monique, Nanterre, Presses universitaires de Paris Ouest, 2014p. 119–139.
Claude Devic et Joseph Vaissète, Histoire générale de Languedoc, édition 1730-1745Livre XXXIX, p. 297-298.
Pierre-Jean Souriac, Une guerre civile : affrontements religieux et militaires dans le Midi toulousain, 1562-1596, Seyssel, Champ Vallon, 2008, 446 p.