L’an mil cinq cens septante | ung feurent consulz, |
noble Jacques dez Guillens, seigneur de
Figuaret,
messireAbrégé : me Claude Janin, banquier,
messireAbrégé : me Pierre Denemauso, nothaireAbrégé : nothe,
Pierre Teyssal, merchant,
Guillaume Dallichon, esperonnierEsperonnier :
fabricant d'éperons (Dictionnaire de la langue
française du seizième siècle, Paris, Honoré Champion, 1925 ; édition
électronique Garnier [consulté en octobre 2014], 17479). , ,
messireAbrégé : me Guillaume Jacomel, masson.
Celle annee le roy, pour effectuer de toutz poinctz
| la reconsilliationAbrégé : reconsilliaon de ses subjectz ensuyvant le edict | de paccifficationAbrégé : paccifficaon, singullierement en ce que conserne | l’administrationAbrégé : administraon de la justice dez differentz, deppendantz | de l’execution Abrégé : execundudictAbrégé : dud edict et eviter toute souspecon dez | jutges du pays, a ces
fins y envoya deux commissaires | desquelz ne pouvoict estre appellé que
a son conseilh | privé, c’est ung maistreAbrégé : me de requestes de son houstel | et aultre Abrégé : aueconseillerAbrégé : coner du parlement de Paris lesquelz, comencantz | tenir leur assizes
a TholoseAbrégé : Thle, continuarent en appres | par toutes les
seneschaucees du pays, y vacquantz envyron | ung an. Au moys d’octobre
de ceste annee feurent | tenuz les estatz du pays a MontpellMontpellier soubz monsseigneurAbrégé : monsr | le visconte de Joyeuse, lieuctenantAbrégé : lieucten general du roy | et lhors mandé par le roy fere vuyder lez
garnisons dez soldatz y estant, dont ce faict feust la __
[Fol. 551 v°]
__ ville remise en son antien estat, libre sans plus
| y voyr armes ez portes, corps de garde a la | lotge, ny ouyr
tambour battant et arquebuzadez, | unze ans appres justement qu’elle
avoyt | esté asservie a cest estat puys[a] Comprendre «
après ». la premiere Abrégé : pmiereelevationAbrégé : elevaon | dez armes. Icelle annee du moys de janvier | en bas pour
l’esterillité dez bledz precedante | feust grand famyne a MontpellierAbrégé : Montpell, tellement | que le cestier du bled ce vandoyt
communement | sept ou huict livres et monta jusques a dix | livres,
et sans la provoyanceAbrégé : provoyan y eust eu en ladicteAbrégé : lad | ville dangier d’esmotionAbrégé : esmon popullaire.
Année 1571 : commentaire historique
La chronique de l’année 1571 commence par rappeler l’édit de Saint-Germain de 1570 (voir cette année) et plus particulièrement les dispositions relatives à la justice et au traitement des différends judiciaires entre protestants et catholiques (art. 35-38) afin de garantir l’équité des procès dans les justices du Languedoc et plus particulièrement au parlement de Toulouse. En effet, celui-ci fait figure d’épouvantail anti-huguenot, tant il a montré dès le début du conflit son engagement contre les protestants, commandant, justifiant et légitimant les massacres, les confiscations et les dénonciations. L’iniquité scandaleuse des procès d’une justice aux ordres conduit Condé en 1569 à créer une cour de justice particulière pour juger en appel les causes entre réformés ; les juges sont choisis parmi les conseillers réformés exclus du parlement de Toulouse pour cause de religion (ils furent même jugés et exécutés en effigie par ledit Parlement). Mais, de facto en 1570, les justices sont séparées ; le roi de justice de tous ses sujets se doit de les réunir pour garantir la concorde civile et religieuse. Aussi, l’édit de Saint-Germain prévoit-il que les différends seront d’abord examinés en première instance devant les juges royaux – baillis, juges ordinaires et des sénéchaussées (art. 35) – puis en appel, non pas devant le parlement de Toulouse, mais devant un autre parlement au choix des parties concernées et, à défaut, devant les maîtres des requêtes à l’Hôtel des parties à Paris (art. 36). Ainsi, le Parlement de Toulouse est tout simplement court-circuité pour tout ce qui touche les procès entre catholiques et protestants. Le Petit Thalamus mentionne l’envoi d’un maître des requêtes ordinaires, Jacques Belot, et d’un conseiller du parlement de Paris, Hodoart de Molé, dans les différentes hautes juridictions pour y tenir leurs assises, c’est-à-dire juger et veiller à l’enregistrement et à l’application de l’édit.
Si la justice est nécessaire au retour à la paix civile, le départ des garnisons est aussi nécessaire pour ramener la sérénité dans la population. C’est ainsi qu’après onze ans de troubles, les compagnies royales logées à Montpellier partent le 13 octobre ; le gouverneur de Montpellier est également remplacé, à la demande des protestants de la ville, le roi nommant le sieur des Ursières, jusqu’à alors capitaine des gardes de la reine. Le 15 octobre, les États s’ouvrent sous l’autorité du duc de Joyeuse, lieutenant général en Languedoc et principal commissaire du roi, qui portent une demande de crue, c’est-à-dire d’augmentation de la part du roi. Elle n’est pas accordée par les États, au vu de la situation du pays, éreinté par le dernier conflit et par un hiver particulièrement rigoureux en Languedoc : à Carcassonne, plusieurs maisons se sont écroulées sur leurs habitants sous le poids de la neige. Le passage des troupes comme les intempéries expliquent la disette qui frappe la ville et impose au pouvoir consulaire le ravitaillement du grenier, pour éviter toute sédition, alors que la situation de la paix est plus que fragile.
Bibliographie :
Stéphane Capot, La Chambre de l’Édit de Castres 1579-1679 : justice et religion en Languedoc au temps de l’Édit de Nantes, Paris, École des Chartes, 1998p. 48.
Claude Devic et Joseph Vaissète, Histoire générale de Languedoc, édition 1730-1745Livre XXXIX, tome V, p. 307.