Le Petit Thalamus de Montpellier

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La chronique française, introduction linguistique

par Chantal Wionet (Université d’Avignon et HEMOC)

OU /O

Le digramme « ou » apparaît bien plus régulièrement que dans l’écrit contemporain, ceci étant une marque de la langue française d’avant Vaugelas. En effet, A ladicte entree furent pourtees toutes les bandieyres des mestiers de ladicte ville (1502), honnourables, fist cloure lad[icte] petite porte (1503), pourta le precieux corps (1505), le proucureur du roy (1510), le prouffit (1510), qui en viendra et sourtira (1510), son lougis, toutellement (ce dernier mot cumulant deux phénomènes vocaliques) sont des formes relativement récurrentes dans la Chronique – même si l’on trouve, comme à l’accoutumée, des contre exemples. Cette façon d’écrire ou de parler relève du commun, ainsi que le montre le commentaire de Vaugelas qui parle à ce sujet d’une prononciation française – et non régionale :

Vaugelas, 164711. Vaugelas, Claude Favre de , 1647, Remarques sur la langue françoise, A Paris, chez Vve Camusat et P. Le Petit. - Portrait, pourtraict. IL faut dire portrait, et non pas pourtrait auec vn u, comme la plus part ont accoustumé de le prononcer, et de l’escrire. Il est vray qu’on a fort long-temps prononcé en France l’o simple comme s’il y eust eu vn u apres, et que c’eust esté la diphthongue ou, comme chouse, pour chose, foussé, pour fossé, arrouser, pour arroser, et ainsi plusieurs autres. Mais depuis dix ou douze ans, ceux qui parlent bien disent arroser, fossé, chose, sans u, et ces deux particulierement, foussé, et chouse, sont deuenus insupportables aux oreilles delicates. […]

On notera cependant que le dernier scripteur, s’il affectionne toujours l’orthographe étymologique et ornementale (il n’hésite pas à surcharger son texte de lettres muettes, et notamment de « h » très inutiles, relligion prethendue et refformee en 1574) n’a pas conservé cette habitude, préférant plutôt la graphie en « o » : personnes d’honneur, nouveaulx consulz sortant, tandis qu’il continue à adopter la graphie en « ai » au lieu de « a » : quant dict et declairé (1574) par exemple.