Le Petit Thalamus de Montpellier

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La chronique française, introduction linguistique

par Chantal Wionet (Université d’Avignon et HEMOC)

L’infinitif

Un autre point peut surprendre le lecteur d’aujourd’hui, celui de l’usage fréquent des propositions dites infinitives :

A cause de quoy par deliberacion de conseil general fust ordonné  estre fait tous les misteres que l’on pourroit faire au roy n[ost]re s[ir]e. (1502)

fist convoquer et appeller ung concille general de l’eglise gallicane du royaume de France estre tenu en la ville et cité d’Orleans (1510)

la ville et cité de Tours auquel furent mandés se trouver tous les archevesques

là où l’usage moderne privilégie les propositions en que (du type « il fut ordonné que tous les mystères soient faits »). C’est là, selon Ferdinand Brunot11. (1927 : 424), une trace du latin classique, les complétives ayant été introduites dès le latin vulgaire. La Chronique porte les marques de cet attachement au latin originel, attachement qui n’est donc pas seulement le fait d’écrivains ou de traducteurs.

Deuxième cas particulier, la possibilité d’user d’un infinitif passé dans des contextes qui aujourd’hui réclament des verbes conjugués. F. Brunot notait la maigre diffusion de ce tour, ce que vient pourtant contredire la Chronique :

Le lendemain matin touz les evesques s’assemblerent a huyt heures en lad(icte) salle et les autres qui vouloie(n)t entrer estoient interrogués a la porte pour qui ilz estoient depputez ausquelz avoir respondu on bailloit ung getton d’estaing signé d’ung cousté J(e)hus et d’autre d’ung porc espic alentour semé de fleurs de lis et n’entrerent plus leans que ceulx qui avoient desd(ictz) gectons led(ict) jour chescun y entra qui y devoyt entrer (1510)

A l’opposité mons[eigneu]r Daccier avoir son camp pousé despuis les thuilleries de la porte dez Carmes jusques a l’entree Sainct Eulalie d’envyron vingt a vingt cinq enseignes de gens de pied

Quand il est question de la langue du 16e siècle, il est bien difficile de systématiser le commentaire…